[Octobre rose] Portrait du Dr Meriem Koual

A l'hôpital, au labo, à la faculté, découvrez notre portrait du Dr Meriem Koual, une femme volontaire et engagée auprès de ses patientes et de ses étudiants.

A l’hôpital / Le recueil de PROMS en sénologie et médecine basée sur la valeur (Value-based health care)- Service de Chirurgie Cancérologie Gynécologique et du Sein – HEGP

Quel est le contexte général qui a donné naissance à ce projet ?

Le service de Chirurgie Cancérologique Gynécologique et du Sein prend en charge chaque année plus de 500 nouveaux cancers du sein. Au-delà des traitements contre le cancer, la qualité de vie pendant et après la maladie est un élément essentiel pour les patientes.
La value-based health est un concept qui propose de mesurer et évaluer les soins à l’aune de la satisfaction et du bénéfice estimé par le patient. Il positionne la satisfaction du patient comme pierre angulaire du système de soins. Mais comment mesurer cette satisfaction et la qualité de vie de nos patientes ? Par la mesure d’indicateurs d’évaluation validés, pour mesurer de façon pertinente l’impact des soins dans la vie quotidienne des patients. C’est ce que l’on appelle la mesure des PROMS (Patient-Reported Outcome Measurement). Nous travaillons avec le Dr Huyen-Thu NGUYEN-XUAN depuis 2 ans à la mise en place de cette méthodologie pour les patientes prise en charge pour un cancer du sein dans notre service.

Présentez-nous votre projet ?

Il s’agit de recueillir de façon systématique les PROMS avant, après la chirurgie du cancer du sein mais aussi à plus long terme au cours de la surveillance. Le projet prévoit aussi le recueil des données cliniques pertinentes (type de cancer, traitements effectués…) ce qui nous permettra de croiser les informations. Le projet est proposé par le médecin au cours de la consultation. Si elle accepte, ce qui est très souvent le cas, elle s’inscrit avec l’aide d’une tablette et de notre infirmière de consultation sur une plateforme sécurisée de l’APHP sur laquelle elle pourra remplir divers questionnaires de qualité de vie adapté à son parcours de soin avant la chirurgie, 6 mois après puis tous les ans. La mise en place d’un projet comme celui-ci demande une méthodologie précise et une collaboration étroite avec le département informatique de l’hôpital. Nous avons été accompagnés par le Dr Virginie Garnier, chargée de projet Value-based health care à l’APHP que je remercie.
Les données recueillies seront analysées dans le cadre de recherches afin d’évaluer la valeur des soins perçue par les patients.

En quoi est-ce innovant ?

Le cancer du sein est un cancer globalement de bon pronostic mais les traitements proposés, qui permettent heureusement la guérison du cancer peuvent altérer la qualité de vie physique, sexuelle et psychologique. Or cet aspect est rarement pris en compte dans le choix des traitements proposés. Et très peu d’équipe médicale en France ont mis en place cette méthodologie de recueil systématique des PROMS.

Quel est l’impact sur la société civile ?

L’ambition d’un projet comme celui-ci est de mettre le patient au centre de sa prise en charge en redonnant du sens et de la valeur aux soins. Il s’agit de privilégier des indicateurs objectifs de qualité fondés sur les résultats. Ce besoin de retour d’évaluations des résultats sur plusieurs années portant sur les bonnes pratiques et la pertinence des soins est une demande des associations de patients, motivée par le souhait d’obtenir une meilleure transparence.

Quels sont les bénéfices sur la population ciblée ?

Vivre mieux après un cancer. La meilleure connaissance de la qualité de vie de nos patientes en fonctions des traitements reçus permettra une meilleure prise en compte de ces données dans le choix des traitements, au bénéfice de la patiente, en respectant bien entendue les recommandations scientifiques dans chaque cas. Mais à efficacité équivalente, la meilleure option thérapeutique en termes de qualité de vie pourra être proposée.

Au labo / Étudier le rôle des polluants dans la progression des cancers du sein (INSERM 1124 Toxicologie, pharmacologie et signalisation cellulaire, équipe 1METATOX)

Comment en êtes-vous arrivée à vous intéresser de près aux polluants de notre environnement ?

J’ai intégré le laboratoire de recherche UMR-S 1124 en 21014 pour mon master 2. Les membres du laboratoire travaillent depuis de nombreuses années sur les effets des polluants et de l’environnement sur la santé. Le cancer du sein est un cancer hormono-dépendant et de nombreux polluants ont des propriétés de perturbateurs endocriniens et beaucoup de données de la littérature sont en faveur d’un rôle des polluants chimiques dans la survenue du cancer du sein. Du fait de ma spécialité médicale, nous avons souhaité développer cette thématique.

En quoi votre recherche est novatrice ?

Nous avons voulu aller plus loin et avons émis l’hypothèse que les polluants organiques persistants pouvaient jouer un rôle également dans la progression des tumeurs cancéreuses mammaires et le développement des métastases.

Quels sont vos principaux résultats ?

Nous avons d’abord réalisé une étude clinique sur une centaine patientes opérées dans notre service et mesuré les taux de 49 polluants organiques persistants dans le sang et le tissu graisseux (cohorte METAPOP). Nous avons montré dans un premier article scientifique que les concentrations de dioxine et de certains autres polluants dont plusieurs polychlorobiphényles dans le tissu graisseux étaient positivement associés au risque de métastases ganglionnaires et à la taille de la tumeur, en particulier chez les patientes en surpoids1. En parallèle, au niveau expérimental, nous avons mis en place avec le Dr Céline Tomkievitcz un modèle de co-culture de cellules cancéreuses mammaires, prenant en compte le tissu graisseux qui est un lieu de stockage des polluant. Ce modèle nous permet de tester différents polluants et nous avons montré par exemple que l’exposition du modèle à la dioxine entrainaient des modifications majeures de la morphologie des cellules qui acquéraient des caractéristiques « cellules souches » associées à la formation de métastase2.

Quel sont les étapes suivantes de vos travaux ?

Le financement Sauver La Vie a permis de réaliser des analyses transcriptomiques c’est-à-dire de l’ensemble des ARN issus de la transcription du génome des tumeurs des patientes. Nous sommes en train d’analyser les résultats pour rechercher des biomarqueurs d’exposition qui pourraient être associés au risque de métastase.

In vitro, nous avons commencé par étudier les effets de la dioxine, puis des extraits de fumée de cigarette avec des résultats très intéressants. Nous continuons d’étudier les mécanismes potentiellement impliqués comme des perturbations du métabolisme. Nous nous intéressons également aux effets d’autres polluants comme l’acrylamide ou les additifs alimentaires dans des projets collaboratifs nationaux et internationaux.

Nos résultats expérimentaux nous ont montrés que plusieurs évènements moléculaires pouvaient être perturbés lors de l’exposition des cellules cancéreuses mammaires aux polluants dans notre modèle. Nous développons des analyses bio-informatiques afin d’ajouter des preuves de concepts à nos résultats précédents, comme la description d’AOP pour adverse outcome pathways qui sont des concepts linéaires formalisés et structurés reliant un événement initiateur moléculaire à un effet indésirable via différents événements clés. Ces AOP sont principalement utilisés en éco-toxicologie, et dans les problématiques de santé réglementaires et nous travaillons à la validation de notre AOP3 par l’OCDE.

A la faculté / Former les étudiants en médecine aux risques environnementaux

Enseignante à la Faculté de Médecine d’Université Paris Cité, j’ai souhaité proposer aux étudiants en médecine une formation aux risques environnementaux, encore méconnus par les professionnels de santé. A travers des interviews d’experts, nous avons avec l’équipe pédagogique et MOOC de la Learning Planet Institute (ex-CRI) créé 10 vidéocapsules pédagogiques sur la santé environnementale. Le programme de l’enseignement, coconstruit avec les étudiants, s’intéressent à différents thèmes comme les grands principes de toxicologie, les liens cancer du sein/environnement, liens entre expositions environnementales et troubles neurologiques et bien d’autres.

Références

1 – Koual M, Cano-Sancho G, Bats A-S, Tomkiewicz C, Kaddouch-Amar Y, Douay-Hauser N, et al. Associations between persistent organic pollutants and risk of breast cancer metastasis. Environ Int. 2019;132:105028.

2 – Koual M, Tomkiewicz C, Guerrera IC, Sherr D, Barouki R, Coumoul X. Aggressiveness and Metastatic Potential of Breast Cancer Cells Co-Cultured with Preadipocytes and Exposed to an Environmental Pollutant Dioxin: An in Vitro and in Vivo Zebrafish Study. Environ Health Perspect. 2021 Mar;129(3):37002.

 3 – Adverse outcome pathway from activation of the AhR to breast cancer-related death.

Benoit L, Jornod F, Zgheib E, Tomkiewicz C, Koual M, Coustillet T, Barouki R, Audouze K, Vinken M, Coumoul X.Environ Int. 2022 May 28;165:107323. doi: 10.1016/j.envint.2022.107323.

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